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"Femme qui rit..."


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Je n'ai jamais douté qu'une pointe d'humour puisse détendre l'atmosphère et permettre de briser la glace entre deux personnes, mais de là à en projeter une au seuil des relations charnelles par la simple puissance d'un trait d'esprit: diantre, cela me semble primesautier, voire assez expéditif.

"Femme qui rit, à moitié dans ton lit" est un dicton étrange. Si l'on entre cette citation (attribuée par certains à Napoléon) dans un moteur de recherche, les résultats affichent tous une certaine homogénéité quant à la vérité scientifique qu'affirmerait cette fulgurance de la sagesse populaire. Il semblerait que les femmes soient "génétiquement programmées pour succomber à un partenaire drôle". J'ai fait mes recherches (lol). 

Quid du libre arbitre ? Si les femmes étaient aussi automatiquement faciles à séduire, il n'y aurait plus un mâle célibataire sur cette petite planète, et il n'y aurait plus un seul homme sérieux. Malheureusement chaque femme est un sphinx dont l'énigme est idiosyncratique, et trop d'hommes accouplés sont dépourvus de la moindre étincelle d'humour. 

Il n'existe d'ailleurs pas de dicton pour l'autre moitié de cette fameuse femme : reste-t-elle à la cuisine ou à la buanderie, fait-elle les courses à la superette du quartier, pendant que l'homme se repait de sa demi-carcasse ? Bizarre. 

Je cherche peut-être la petite bête, je devrais m'abandonner à la drôlerie du proverbe, mais j'ai un peu peur de finir partiellement dans le lit de quelque mâle de passage après avoir trop ostensiblement pouffé. Après tout le dicton ne désigne pas l'origine de l'hilarité, et il se pourrait qu'un spectacle comique soit un bon endroit pour rafler 50% d'une innocente demoiselle. Je suppose que pour certains paresseux cette aubaine suffirait à mener leur petite affaire à bien.

Quand on voit les torrents de bêtise déversés par certains influenceurs sur les réseaux sociaux concernant leur rapport aux femmes et à la façon de dompter ces impétueuses créatures (mépris, violence, corruption, manipulation, emprise...), on pourrait se dire qu'au final le piège humoristique tendu par ce dicton emble bien anodin, bien innocent.

Et l'homme qui rit, il atterrit où ? La sagesse populaire a omis cette situation. "Homme qui rit, à moitié endormi"? Quand j'ai trop ri, une bonne sieste me tend les bras, mais là je ne parle que de moi, je m'égare. 

L'Olympia de Manet (1863) est une œuvre majeure de l'art occidental. Une fois cela dit, si l'on pose sur ce tableau un regard actuel, ce qui a fait scandale lors de sa présentation en 1865 au Salon n'est plus ce qui ferait débat maintenant. On pourrait disserter pendant des heures sur la représentation de la femme tant par la nudité affichée de l'une, que par le contexte social induit par la scène et donc la subjugation de l'autre.

Tant qu'a continuer sur la lancée assez phallocrate de cette représentation, autant comprendre que cette demi-mondaine une fois alitée par tant d'esprit, finira totalement conquise par le cadeau, en l'occurrence un somptueux bouquet de fleurs, un luxe absolu pour l'époque. 

On est idéologiquement encore loin des luttes féministes du vingtième siècle, et le caractère avant-gardiste de l'œuvre pour l'époque peut sembler aujourd'hui bien faible à cet égard.

Mon dessin fonctionne donc sur plusieurs niveaux de lecture : une blague graphique avec une référence historique au premier abord, puis plus en profondeur, des pistes de réflexion sur le traitement de la femme tant en art qu'en société.

Mais ce n'est qu'un dessin...

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